"A compter du 1er janvier 2014, un arrêté du ministère de la santé du 6 février 2001 (J.O. du 23/02/2001) interdisant l’utilisation de nombreux colorants dans les produits cosmétiques et les teintures pour cheveux va s’appliquer, par extension, au tatouage. Cet arrêté a été pris en application d’une réglementation communautaire. Mais, sur les 28 pays européens, seule la France souhaite l’étendre aux encres de tatouage, au nom du principe de précaution. La mobilisation de la communauté du tatouage est sans précédent. Le SNAT (syndicat national des artistes tatoueurs) qui représente la profession est, depuis la mise en place de cet arrêté, en première ligne pour essayer d’obtenir l’annulation de ce texte de Loi. Les adhérents ont mis toute leur énergie pour amener les preuves de l’innocuité des produits de tatouage sans pour autant parvenir à être écoutés de façon objective par l’administration compétente. Le Syndicat, porté par le mouvement revendicatif du monde du tatouage, est en train d’étudier la mise en œuvre d’une manifestation à Paris dans le courant du mois de décembre. Les tatoueurs français ont également mobilisé autour d’eux pour faire entendre leur voix. Ils ont par exemple pu compter sur le soutien émouvant de Jim Appay, jeune homme récemment tatoué qui a, spontanément, lancé une mobilisation générale sur les réseaux sociaux. Il a été rapidement rejoint par Stéphane Chaudesaigues, tatoueur reconnu internationalement depuis 25 ans qui, de Copenhague à Paris, en passant par le Cantal, milite ardemment contre l’interdiction des encres couleur de tatouage. Stéphane Chaudesaigues joue de son réseau pour sensibiliser les élus régionaux et nationaux afin qu’ils interviennent auprès du gouvernement pour aider la communauté des tatoueurs sur ce dossier qui met en péril tout un secteur d’activité.
Vers un exode ou un retour à la clandestinité des tatoueurs français ?
La France se met de nouveau dans une situation absurde et ridicule. Ainsi un tatoueur, installé à Abeele, rue Abeleplein, pourra utiliser des encres couleur et celui installé Rue Cassel, ne pourra pas. Sauf qu’il s’agit de la même rue qui change de nom, la frontière franco-belge passant au milieu de la rue principale de ce paisible village des Flandres.
Les services de santé des 27 autres pays de la communauté sont-ils des assassins en puissance ?
Si les encres couleurs de tatouage avaient eu une telle toxicité et présentaient un réel danger pour la santé, pourquoi avoir attendu 13 ans pour les interdire ?
Durant toutes ces années, quelle enquête sérieuse a été menée pour évaluer leur dangerosité ?
Quels produits se sont avérés dangereux et combien de cas de maladies liées au tatouage couleurs ont été dénombrés ?
Les articles sur les dangers du tatouage parus dans la presse, allant jusqu’au cancer, le sont suite à un communiqué d’un syndicat de dermatologue qui emploie une terminologie au conditionnel comme « peut », « susceptible » ou encore « potentiellement ». Sans citer un seul cas avéré. Surtout en énonçant, à la fin du communiqué, qu’avant de se faire tatouer, il est préférable de voir un dermatologue. Peut-être veulent-ils qu’il y ait un certificat d’aptitude comme pour la pratique d’un sport ?
Plus sérieusement, en consultant les annales de dermatologie, on trouve très peu de cas de maladies liées au tatouage. Le plus souvent des problèmes d’infection dus à un défaut d’hygiène. Quelques rares cas de réactions allergiques sont décrites ; souvent dans des situations très particulières, voire exceptionnelles. Par contre, les réactions allergiques au henné lors de tatouages labiles ne sont pas rares et dues, non pas au henné brun, mais au fixateur et colorant noir ajouté, la paraphenylènediamine (PPD). Surtout dans les pays du Maghreb et, particulièrement, au Maroc.
Quelques patients tatoués ont développé des cancers de la peau, sans pouvoir associer l’origine de la maladie au tatouage. Rapporté au nombre de tatoués, le pourcentage de cas n’est pas plus important que chez les non tatoués.
Si le problème majeur reste les allergies, pourquoi ne pas obliger les fournisseurs d’encre et de pigments à mettre obligatoirement la composition de leurs produits sur l’étiquette, avec les risques d’allergies liés ?
Par contre, comme l’histoire l’a toujours démontré, la prohibition a systématiquement généré une économie parallèle. Renvoyer les tatoueurs dans les arrière-cours ou les forcer à l’exil frontalier pour exercer leur art équivaudrait à renier une activité forte de milliers de professionnels.
Une législation encadrant la profession de tatoueur, lui donnant un statut, prévoyant une réelle formation par l’apprentissage avec un programme de formation défini, établie en concertation entre la profession et l’Etat, serait par contre, elle, profitable à tous.
Un encadrement est toujours préférable à une interdiction qui donne surtout l’envie de la transgression. Le tatouage couleur est devenu un phénomène de société, bien au-delà d’un simple phénomène de mode. Il est totalement illusoire de vouloir l’arrêter sur le seul sol français.
Tatoueurs et tatoués mobilisés
Un débat entre scientifiques et professionnels du tattoo sur les encres couleur s’est récemment tenu à Copenhague lors de l’ECTP « Congrès européen sur le tatouage et la recherche sur les pigments » 2013. Cette conférence internationale a été organisée par Nicolas Kluger, dermatologue français de renom et spécialiste du tattoo, et Jørgen Serup, Directeur du département de dermatologie à l’hôpital universitaire de Bispebjerg. Ils avaient invité les représentants des syndicats de tatoueurs allemands, le DOT, et français, le SNAT, ainsi que le Directeur de marque d’encres Intenze et celui de la marque Eternal. Ce congrès a marqué le premier pas de ce que l’on espère être une longue et fructueuse collaboration entre hommes de science et professionnels du tatouage pour aller vers plus de rigueur scientifique dans l’approche des risques liés au tatouage.
Dans le même temps, en France, un jeune tatoué de 20 ans, Jim Appay, a lancé une pétition sur les réseaux sociaux qui a déjà récolté plus de 80 000 signatures. Jim est étudiant en informatique à Avignon.
Le 1er janvier 2014 approche à grands pas. Le combat est désormais à la fois scientifique et politique.
La pétition initiée par Jim Appay aura d’autant plus de poids vis-à-vis des élus et de l’état qu’elle aura recueilli un très grand nombre de signatures. Stéphane Chaudesaigues et Jim Appay appellent à signer la pétition « Non à l'arrêt des couleurs des tatouages » pour que les tatoueurs français, qu’il s’agisse des plus grands noms internationalement reconnus ou des tatoueurs moins chevronnés, ne soient pas contraints à l’exil".
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